La vie sans temps et sans chiffres

La culture de la tribu Pirahã existe depuis des siècles. Ce peuple se passe de chiffres,  de mesures de temps et de noms de couleurs. Personne ne sait  lire ou écrire. De plus, ils ne savent presque rien de leur propre histoire. C'est la seule société au monde qui n'a pas élaboré de mythe de la création.

En plein cœur de la forêt amazonienne, au bord de la rivière Maici et sous le couvert d'une végétation luxuriante il y a une petite école. Daniel Everett, linguiste, revient à l'essentiel avec ses nouveaux étudiants. « Um, dois, tres» - dit-il soigneusement en portugais. Et encore une fois : « Un, deux, trois ». Toutefois, les indigènes ne jettent que des regards indifférents au professeur. Cette tâche est plus difficile qu'il pourrait le penser.

Dans les années 70, le professeur Everett, missionnaire et maintenant ethnologue à l'Université de Manchester, décide d'étudier les membres d'une tribu peu connue Pirahã à compter les chiffres. Eh bien, il doit assumer son échec. En effet, il se trouve dans un monde sans chiffres et sans temps. C’est un monde dans lequel au lieu d’employer des mots les gens ronronnent et sifflent.

Il s’avère que cette tribu isolée, comptant environ 350 personnes dans de minuscules villages au fond de la jungle brésilienne peut changer notre compréhension de la langue.

Lors d'une de ses premières visites, à la fin des années 70, Everett commence à comprendre comment les membres de la tribu communiquent. La découverte est brutal. Une nuit, le professeur les écoute. En essayant de comprendre l’essentiel de leur conversation il subit un choc terrible – il s’aperçoit qu’ils ont l’intention de le tuer après la nuit tombée. Une fois à la cabane, il s’y protège avec sa famille contre les malfaiteurs. « J'ai caché leurs armes, arcs et flèches » - dit-il. Triomphé, lui, un visiteur d'un monde étranger, il les surprend en prouvant ce qu'il vaut. Les indigènes sont tellement étonnés par le fait qu’un étranger est en mesure de comprendre leur langue qu’ils changent leur attitude envers lui. Dès ce moment, ni lui ni sa famille n'ont plus de problèmes. Bien que, le professeur veuille, imposer sa religion et sa vision du monde aux autochtones il y échoue. Son objectif principal consiste à éclairer « le peuple abruti ». Cependant, avec le temps, il se réconcilie avec son impuissance, s’imprègne de la nouvelle tradition et commence à s’adapter à une nouvelle culture. En fin de compte, c’est lui qui abandonne sa religion et change son concept de mode de vie.

Selon de nombreux scientifiques, l'incapacité de Pirahã à apprendre à compter confirme la théorie selon laquelle le langage forme la manière de penser. Il s’ensuit que les gens ne peuvent qu’exprimer les pensées qui sont déjà nommées. Cependant, Everett est d'un avis différent. Dans son article publié l'année dernière, il souligne le rôle de la culture Pirahã, unique en son genre, qui rend impossible la capacité à compter. À l’appui de cette constatation, il explique que les indigènes se réfèrent exclusivement à leur expérience personnelle. Ces gens n'utilisent pas les mots pour les concepts abstraits à savoir : couleurs, mémoire et chiffres. En outre, Il n'y a pas de passé, car chaque action se fait au moment actuel. Leur existence se résume à vivre l’instant présent et à profiter de l’ « ici et maintenant ».

- une histoire écrite par Mme. K. WARDA, publiée le 04/10/2018 à 19h00.




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